La Mariée de Willow Creek

Si la maison de Sam lui avait paru petite de prime abord, Angie ne fut pas longue à s'en féliciter. Ses journées étaient entièrement occupées par le ménage, la lessive, les courses et la cuisine. Sa seule distraction était la tasse de café qu'elle prenait parfois dans la matinée avec Molly Johnson, entre deux coups de plumeau.

Le samedi, elle dut renouveler les provisions et paya de sa bourse. De plus, lorsque le marchand de glace se présenta, il lui demanda de lui régler la facture, ce qui ponctionna encore ses maigres économies.

Pendant que la pâte à pain levait, elle s'installa à l'extérieur, sous le porche de la cuisine, pour plumer les poulets. Plus loin, sur les pentes de la colline, s'élevait la fumée des pompes à eau situées près des mines. Avec celle des locomotives qui tiraient les wagons de minerais, elle formait de longues traînées nébuleuses et grises qui flottaient au-dessus de la ville. Jour et nuit, les activités de Willow Creek étaient source de poussière et de bruit. Angie n'était pas habituée à ce tumulte incessant. Les mines fonctionnaient vingt- quatre heures sur vingt-quatre. Un mineur terminant à minuit trouvait toujours un saloon, un restaurant, une salle de jeu ou de danse ouverte.

Sam ne rentrait jamais avant la tombée de la nuit. La veille, ses filles étaient couchées depuis longtemps quand il était revenu. Il s'était glissé en silence dans la cuisine pour voir si Angie lui avait laissé de quoi manger. Elle n'en avait rien fait.

Mais ce soir, elle l'attendrait de pied ferme, car elle voulait lui parler.

Si elle le voyait peu, elle pensait beaucoup à lui. Un peu trop même. Elle s'était aperçue avec surprise qu'elle prenait un grand plaisir à le regarder se raser le matin devant son petit miroir, se coiffer, nouer ses cheveux sur sa nuque. Elle lui faisait même chauffer de l'eau pour sa toilette et étendait sa serviette qu'il négligeait de suspendre.